dimanche 7 juin 2009

Gilead - Marilynne Robinson

John Ames est pasteur à Gilead, une petite ville de l'Iowa, près du Kansas. A plus de 70 ans, son coeur est très faible et il sent venir sa mort. Il décide alors d'écrire une longue lettre à son jeune fils unique de 7 ans afin de lui parler de sa propre enfance aux côtés de son père et de son grand-père, eux-mêmes pasteurs, de le conseiller sur sa vie future et surtout de lui exprimer tout son amour.
Nous sommes dans une région où le climat est rude, sec, les habitants sont pour la plupart très misérables mais le narrateur nous décrit son attachement à cette terre, à cette ville où il a toujours vécu:

"J'aime la Grande Prairie! Tant de fois j'ai vu l'aube se lever, la lumière se répandre sur la plaine, sur chaque chose se mettre à rayonner au même instant tandis que le mot"bon" s'affirmait si profondément dans mon âme que j'étais ébahi qu'on m'autorise à assister à un tel spectacle".*1


En toile de fond de cette longue lettre, nous percevons la guerre de sécession, la lutte pour l'abolition de l'esclavage, les Free Soilers (abolitionistes), "ceux qui ne s'allient pas à la grande cause, les dough faces" *2 (les têtes molles) ainsi que les divisions que cela pouvaient engendrer, dans la propre famille du pasteur. Son grand-père, cheveux hirsutes, borgne, excentrique, distribuant autour de lui le peu qu'il possède était un activiste forcené de la lutte contre l'esclavage et prit même les armes finalement. Pour ces raisons, il fut, une grande partie de sa vie, en totale opposition avec son propre fils, le père du narrateur qui refusait le combat armé.
L'auteur nous parle donc essentiellement dans ce livre des relations père-fils, de la transmission des valeurs (le pasteur conserve dans son grenier des centaines de sermons qu'il a écrit tout au long de sa vie) mais aussi du bonheur de l'existence:

"Ces derniers temps j'ai réfléchi à l'existence. En fait, j'ai éprouvé tellement d'admiration pour l'existence que c'est à peine que j'ai pu en profiter convenablement"*3.

Le narrateur nous propose de nombreux allers-retours entre passé et présent et réussit à alterner en finesse, de profondes réflexions sur sa foi, sur ses propres limites dans sa relation aux autres, sur la mort etc...avec la description de détails futiles de son quotidien, les jeux de son fils avec son chat, le base-ball, les expressions sur le visage de sa femme ...

Ce livre m'a fait un bien fou!

*1: p330
*2: p237
*3: p68

"Gilead" de Marilynne Robinson
Actes Sud 2007. 331 pages
Pulitzer Prize for Fiction
National Book Critics Circle Award

2 commentaires:

  1. Le premier extrait nous donne une idée de la qualité du texte, un titre à retenir donc !

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  2. Oui tout à fait Liss, l'intérêt de ce livre vient aussi de la belle écriture, très poétique parfois.

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